Marion Wolff
Gérer le stress et l’anxiété : suffit-il de se détendre ?

La sophrologie est fréquemment sollicitée lorsque le stress devient souffrance. Pourtant, un lieu commun revient fréquemment : nombreuses sont les personnes qui limitent la sophrologie à de la relaxation. Certes, la sophrologie utilise la détente pour induire un état de conscience modifiée mais ce n’est pas une fin en soi[1]. D’ailleurs soyons honnête, juste se détendre lorsque l’on est stressé peut soulager sur le moment mais comporte deux risques : celui de se limiter à des techniques palliatives et celui d’encourager le déni. A mon sens, une gestion du stress adaptée et pertinente suppose de creuser un peu plus.
Tout d’abord, évaluer l’intensité de la situation est un préalable judicieux qui permet de prendre progressivement conscience du chemin parcouru. Deux dimensions sont à considérer : d’une part repérer et identifier les facteurs de stress, d’autre part mesurer l’intensité du stress perçu[2]. On pourra alors chercher à réduire la quantité de stresseurs ou à renforcer sa capacité à supporter le stress, ou les deux.
De plus, il est souvent utile d’opérer un travail de déconstruction des croyances et représentations qui peuvent alimenter le stress en interne. Par exemple si je pense que « vu que je suis moins intelligente que ma collègue, il faut que je travaille deux fois plus », je peux avoir tendance à m’infliger une pression intense toute seule. Ainsi une déconstruction cognitive peut contribuer à prendre conscience et faire bouger certaines postures.
Par ailleurs, les exercices variés tels que la respiration ou la cohérence cardiaque restent des incontournables aussi bien pour réagir en situation d’urgence que pour anticiper et réguler le stress au quotidien. Cependant il serait dommage de s’y limiter : il est possible d’utiliser la nécessité de gérer son stress comme une opportunité pour acquérir une compétence plus large et fort utile, celle de la gestion des émotions. Or pour gérer une émotion, le pire à faire serait de la refouler. La sophrologie permet une approche plus complète : apprendre et s’autoriser à ressentir les émotions en les localisant au niveau corporel, puis les identifier pour les verbaliser et creuser ce qui y est associé. Alors seulement est-il possible de choisir en conscience quoi en faire, donc de gérer à proprement parler.
A partir de là, plusieurs axes permettent d’y voir plus clair : pour certains ce sera une réflexion autour de leurs propres valeurs existentielles, pour d’autres il s’
agira de se relier à des ressources personnelles sous-estimées pour oser faire les choses différemment. Chacun peut en conscience s’ouvrir à de nouveaux possibles selon sa propre expérience subjective.
Dans l’ensemble, la sophrologie associée à des outils cognitifs permet donc de développer des compétences opérantes pour une gestion du stress adaptée au conscient : pour certaines personnes, le mieux-être ainsi acquis peut s’avérer transformateur et largement satisfaisant. Il convient de préciser cependant que, dans certains cas de figure, une telle approche de gestion du stress n’est pas toujours la meilleure option.
En effet, certaines personnes vivent avec des symptômes d’anxiété que le stress ne fait qu’exacerber ( crise d’angoisse, TOC, …). Ces symptômes peuvent parfois être mis sur le compte du stress alors qu’ils sont plus complexes[3]. Si l’approche précédente de gestion du stress peut soulager légèrement, elle risque de s’avérer limitée voire insuffisante et peut-être même dangereuse (déplacement de symptôme) ou tout au moins leurrante. Dans ces cas là, une possibilité courageuse consiste à explorer les causes du côté de l’inconscient : on détricote avec un psychanalyste ce qui cherche à se dire à travers le symptôme, ce qui se répète de façon compulsive. Alors c’est beaucoup plus long car il faut se caler sur le rythme de l’inconscient qui met du temps à bouger. C’est parfois même douloureux. Mais lorsque le symptôme tombe, c’est définitif.
Pour conclure, il est possible d’apprendre à gérer son stress au conscient grâce à certaines approches comme la sophrologie. Parfois cela soulage aussi l’anxiété, parfois on peut choisir de se débarrasser du symptôme anxieux en s’attaquant directement aux causes grâce à une psychanalyse. On peut aussi choisir de ne rien faire. L’idéal étant d’assumer son choix.
[1] La finalité de la sophrologie étant le développement d’une conscience affinée, vivante et phénoménologique. [2] Pour cela on utilise souvent les grilles largement plébiscité du psychiatre Charles Cungi. [3] La psychanalyse considère le stress et les troubles anxieux comme une manifestation de l’angoisse.